| Ramzi Chamat
Les taux d'intérêt sont un levier crucial pour l'économie d'un pays, déterminant directement le coût des emprunts pour les entreprises et les ménages. En Suisse, la Banque nationale suisse (BNS) ajuste régulièrement ses taux directeurs en fonction des conditions économiques locales et internationales. Actuellement, alors que le monde se remet encore des impacts économiques de la pandémie et des répercussions géopolitiques telles que la guerre en Ukraine, la possibilité d'une nouvelle baisse des taux d'intérêt est à l'étude. Cette perspective soulève des questions essentielles quant aux effets potentiels d'une telle décision. Dans cet article, nous examinerons en profondeur les arguments en faveur d'une baisse des taux d'intérêt en Suisse et comment cette mesure pourrait favoriser une reprise économique durable et un renforcement du marché immobilier. Le 20 juin 2024, la BNS décidera peut-être d'une réduction de 0,25 point de base !
Depuis plusieurs mois, la Suisse traverse une période de stabilité relative en ce qui concerne les rendements des emprunts d'État et les intérêts hypothécaires. Cette tendance latérale, en place depuis mars, reflète une certaine prudence des marchés financiers dans un contexte économique mondial complexe. Pourtant, de nombreuses voix s’élèvent pour plaider en faveur d’une baisse des taux d'intérêt par la Banque nationale suisse (BNS). Cet article explore les différentes facettes des arguments positifs en faveur d’une telle décision cruciale pour l'économie suisse et, en particulier, pour le marché immobilier.
Pour comprendre les dynamiques locales, il est essentiel de les replacer dans un contexte global. Aux États-Unis, la situation économique s'est révélée meilleure que prévu, repoussant les anticipations de baisse des taux directeurs au second semestre de l'année. En revanche, la Banque centrale européenne (BCE) a déjà signalé son intention de réduire ses taux dès juin. Cette divergence entre les grandes économies mondiales souligne la complexité des décisions de politique monétaire et l'importance des contextes économiques locaux. Pour la BNS, cette situation européenne pourrait justifier une baisse de ses taux directeurs afin de rester compétitive et de stimuler l'économie nationale.
L'un des principaux arguments en faveur d'une baisse des taux est la maîtrise de l'inflation. En Suisse, l'inflation est prévue à 1,2% cette année et 1% l'année prochaine, des niveaux nettement dans la marge de fluctuation de la BNS. Avec un taux directeur actuel de 1,5%, certains analystes estiment que ce niveau est légèrement trop élevé. Une baisse de taux pourrait ainsi être justifiée pour maintenir un équilibre optimal entre la croissance économique et la stabilité des prix.
Les marchés obligataires partagent cette vision. Il est attendu que la BNS réduise son taux directeur à 1,25% en juin, avec une autre baisse probable en septembre. Cette anticipation se reflète déjà dans les cours actuels, ce qui suggère que les investisseurs ont intégré ces perspectives dans leurs stratégies. Une baisse des taux permettrait de maintenir des conditions de financement favorables, cruciales pour soutenir l'investissement et la consommation, moteurs de la croissance économique.
Les prévisions indiquent que les taux d'intérêt suisses à long terme devraient continuer à évoluer latéralement au cours des prochains trimestres. Cependant, les taux hypothécaires liés au SARON (Swiss Average Rate Overnight) devraient bénéficier des baisses des taux de la BNS. Cela pourrait stimuler le marché immobilier en rendant les prêts hypothécaires plus accessibles et moins coûteux pour les acheteurs potentiels. Une baisse des taux hypothécaires signifie également que les propriétaires existants pourraient refinancer leurs prêts à des conditions plus favorables, libérant ainsi des fonds pour d'autres investissements ou dépenses de consommation.
Un élément crucial du marché immobilier est le taux d'intérêt de référence hypothécaire, pertinent pour les loyers. Malgré les baisses de taux prévues, ce taux devrait rester stable à 1,75% au cours des 12 prochains mois. Cela signifie que les locataires ne devraient pas s'attendre à une réduction des loyers, même si les conditions de crédit s'améliorent pour les acheteurs. Cette stabilité peut être vue comme un facteur de résilience pour le marché locatif, évitant des fluctuations trop marquées des coûts pour les locataires. Toutefois, à long terme, une réduction continue des taux hypothécaires pourrait exercer une pression à la baisse sur les loyers, améliorant l'accessibilité au logement pour un plus grand nombre de personnes.
Les taux d'intérêt sont soumis à des variations importantes, influencées par divers facteurs économiques et géopolitiques. La dernière dynamique significative remonte à 2022, avec l'envolée de l'inflation post-pandémie et la guerre en Ukraine. La BNS, comme d'autres banques centrales, a réagi en augmentant ses taux directeurs pour juguler l'inflation. En 2023, alors que l'inflation se stabilisait, les rendements des emprunts se sont maintenus à un niveau élevé avant de chuter en anticipation des baisses de taux. Cette histoire récente illustre la complexité de la gestion monétaire dans un environnement mondialement interconnecté.
Les prévisions à long terme des taux d'intérêt montrent une légère tendance à la baisse, bien que sujette à des variations en fonction des conditions économiques. Pour le SARON, les taux devraient passer de 1,46% actuellement à 1,00% d'ici fin 2024. Les swaps à 3, 5 et 10 ans suivent une trajectoire similaire, reflétant une détente progressive des conditions de crédit. Ces perspectives offrent une certaine visibilité pour les entreprises et les ménages, facilitant la planification financière et les décisions d'investissement à long terme. Une telle prévisibilité est cruciale pour la stabilité économique, permettant aux entreprises de planifier leurs investissements en capital et aux ménages de gérer leurs finances personnelles avec plus de certitude.
Une baisse des taux d'intérêt rend le crédit moins coûteux, ce qui peut stimuler l'investissement des entreprises et la consommation des ménages. Les entreprises peuvent emprunter à des taux plus bas pour financer leurs projets d'expansion, acheter de nouveaux équipements ou investir dans la recherche et le développement. De leur côté, les ménages peuvent bénéficier de taux hypothécaires plus bas, ce qui réduit leurs paiements mensuels et libère des fonds pour d'autres dépenses. Cette augmentation de la consommation et de l'investissement peut, à son tour, soutenir la croissance économique globale, créant un cercle vertueux d'expansion économique.
En stimulant l'investissement et la consommation, une baisse des taux d'intérêt peut également avoir un impact positif sur le marché de l'emploi. Les entreprises qui investissent dans de nouveaux projets ou qui se développent sont susceptibles de créer de nouveaux emplois. De plus, une augmentation de la consommation peut conduire à une demande accrue de biens et de services, encourageant les entreprises à embaucher davantage de personnel pour répondre à cette demande. Ainsi, une politique de taux d'intérêt plus bas peut contribuer à réduire le chômage et à améliorer les perspectives d'emploi pour de nombreux travailleurs suisses.
La question de la baisse des taux d'intérêt en Suisse présente des arguments convaincants en faveur d'une telle décision. Une réduction des taux pourrait stimuler l'économie et soutenir le marché immobilier en rendant le crédit plus accessible et moins coûteux. Cette mesure permettrait de maintenir des conditions de financement favorables, essentielles pour encourager l'investissement et la consommation, moteurs de la croissance économique. La maîtrise de l'inflation et la stabilité des rendements à long terme renforcent la justification d'une telle politique. Pour les investisseurs, les emprunteurs et les acteurs du marché immobilier, les prochains mois seront cruciaux pour adapter leurs stratégies aux évolutions des taux et aux décisions de la BNS.
Article rédigé par Ramzi Chamat, CEO et Fondateur du Groupe OAKS (OAKS LANE SA / OAKS CAPITAL SA)